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7 - La bourse est plus risquée que l’immobilier ? Déconstruction d’une idée reçue.

22 novembre 2024 - Belfortino

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Dans cet article, je vais expliquer pourquoi l’investissement immobilier n’est pas un placement particulièrement sûr, contrairement à une idée généralement admise en France. Je vais notamment montrer les défauts rédhibitoires de ce type d’investissement comparé à la bourse « en direct » (en titres de sociétés cotés).

1 - Les caractéristiques et les contraintes de la location

Si vous êtes novice en matière de placement, il est probable qu´en sollicitant des conseils auprès de vos proches, ils vont évoquer le dépôt d´argent sur livret A (jusqu’à 22950€), peut être l’assurance-vie en euros (sur des fonds en euros faiblement rémunérés mais considérés comme très sécurisés) et … l’investissement immobilier tout en vous incitant à acheter votre logement. L’argument utilisé pour promouvoir l’immobilier est souvent le même : il faut acheter son logement pour éviter de « brûler » de l’argent en rémunérant un propriétaire, pour éviter de payer un logement « à fonds perdus ». Cette approche de la location est fallacieuse, car elle oublie de vous faire apparaître l’avantage de la location : vous restez entièrement libre de déménager, sans avoir à vous inquiéter de la perte de valeur d’un actif immobilier ! Pour comprendre le problème, il faut réintégrer la liberté permise par la location dans un cadre plus large : celui du choix de vie ! Je rappelle également que si le remboursement d’un emprunt ne se fait plus intégralement « à fonds perdu », il y a tout de même une part importante de la mensualité versée à la banque qui vient la rémunérer, surtout si le taux d’emprunt (que le propriétaire restera tout de même libre de renégocier si les taux baissent) est élevé. Si la mensualité du prêt est plus importante que celle de la location du même bien, le nouveau propriétaire accepte implicitement un déficit de capacité à consommer, sur un temps long, s’il ne bénéficie pas d’une augmentation de salaire…

Lorsque l’on est locataire, ça peut être parce que l’on est étudiant, parce que l’on quitte le logement de ses parents au moment de débuter dans la vie active sans disposer de l’apport nécessaire à un achat, parce que l’on ne dispose pas d’un emploi garanti (trop précaire, temporaire, transitoire pour s’orienter ensuite sur un poste mieux payé, plus en accord avec ses études ou ses choix professionnels). Souvent, le locataire songera à devenir propriétaire lorsqu’il signera un CDI, lorsque son couple se stabilisera, lorsqu’une naissance interviendra … Cette volonté sera alimentée par une recherche de la sécurité (cf pyramide de Maslow). Si l’on décide d’acheter son logement pour obtenir une sécurité, l’utilité de cet achat reste valide, notamment parce que le propriétaire peut récupérer son logement à tout moment (pour héberger un membre de sa famille) et mettre le locataire dehors. De la même manière, il est sécurisant d’acheter son logement lorsque l’on arrive en retraite, au moment où ses ressources baissent…

Dans mon propos, je ferai une distinction claire entre l’achat immobilier pour obtenir une sécurité (pour soi, son couple, ses enfants, pour s’assurer une bonne qualité de vie etc) et l’investissement immobilier pour placer un capital sur un actif réel.

À titre personnel, je considère « l’investissement immobilier » (à crédit en espérant que le locataire paye le remboursement du crédit) comme quelque-chose de tellement contraignant, lorsqu’on le compare à l’investissement en bourse, que ça ressemble à une prise de risque disproportionnée par rapport au bénéfice attendu, susceptible de conduire l’investisseur au désastre du surendettement, une situation bien pire que la seule perte d’un capital placé en bourse. Ce risque de surendettement étant la contre-partie de l’utilisation de « l’effet de levier » (consistant à partir d’une base de capital plus importante grâce à l’emprunt pour générer de la création de valeur), pour se bâtir un patrimoine immobilier.

En effet, la valeur d’un bien immobilier est élevée parce que le secteur géographique est attrayant, l’environnement physique agréable (face a un lac, près d’un parc, avec une vue magnifique en haut d’une colline etc) ou l’environnement économique prometteur (la grande ville étant le lieu d’activité des grandes entreprises, avec parfois des secteurs économiques variés). Si l’on prend cette caractéristique en considération, on ne peut pas dire que l’investissement immobilier soit « sûr », notamment dans une ville de taille moyenne dont l’économie découle de celle d’un employeur principal, avec une activité restreinte à une thématique précise.

Que se passerait-il pour les prix de l’immobilier à Vesoul si Stellantis, qui emploie actuellement 3800 salariés sur son site, commence à licencier ou délocalise ? Que se passe-t-il à Belfort si Alstom se porte mal ? À Lons-le-Saunier si l’Etat décide de déplacer les nombreux services administratifs associés au statut de préfecture du Jura de cette ville ? Ainsi, on voit clairement que la prétendue sécurité du placement immobilier sur ces villes demeure étroitement liée à une entreprise, une thématique (présence d’administrations, d’un complexe hospitalier ou étudiant)… Qui aurait envie d’aller vivre dans une zone sinistrée ? Comment les commerces pourraient-ils survivre si l’employeur principal, jouant un rôle moteur pour l’ensemble de l’écosystème économique de la ville, disparaît ? De ce point de vue, la sécurité du placement immobilier est extrêmement discutable. En comparaison, le portefeuille boursier permet de diversifier son risque, par secteur géographique , par taille d’entreprise, par secteur d’activité (finance diversifiée, banque, énergie, ingénierie, aéronautique, alimentaire, événementiel, électronique, informatique etc).

De la même manière, un bien immobilier a besoin d’être régulièrement rénové, parfois parce que la réglementation évolue (voir notamment les Diagnostics de Performance Énergétique qui deviennent contraignant pour louer), donc de manière obligatoire, avec de très importantes dépenses à la clefs, impactant sévèrement la rentabilité de la location. Il y a également la taxe foncière, payée par le propriétaire et qui ne peut être récupérée sur le locataire dans le cadre d’un bail d’habitation. En dehors des travaux liés au bien, d’autres contraintes peuvent concerner des dépenses votées lors de l´assemblée générale de copropriété, comme un ravalement de façade, une réfection du toit, une mise aux normes de l’ascenseur etc … Ces dépenses sont tellement importantes qu’elles peuvent placer le propriétaire en difficulté financière. Encore une fois, il faut comprendre que le bénéfice de l’achat immobilier (dans le cadre d´un investissement ou pour habiter) est soumis à des aléas tellement importants que le propriétaire peut se retrouver rapidement en situation d’insécurité financière… une insécurité qui peut être encore aggravée par une vente rapide impossible, surtout si l’économie locale est en difficulté, si un problème particulier a été mis en évidence (trouble de voisinage, détérioration de la qualité de vie dans le quartier, augmentation de l’insécurité, endettement de la ville excessif se répercutant sur le montant des taxes locales, copropriété en défaut de paiement, charges de copropriété devenues insupportables, problèmes de structure de l’immeuble, rénovation critiques non effectuée, explosion du prix du carburant rendant difficile la mobilité hors de la ville moyenne, explosion du prix de l’électricité pour un logement n’ayant pas d’autre moyen de chauffage etc). De la même manière, l’insécurité financière sera présente si le prêt immobilier ne peut pas être soldé par la vente d’un bien dont la valeur a baissée.

Une autre contrainte essentielle est associée aux projets de vie : il peut être nécessaire de déménager rapidement (et donc de vendre rapidement) parce qu’il manque une pièce pouvant accueillir un enfant, parce que le couple se sépare, parce qu’un changement d’emploi ou de lieu de travail peut être nécessaire (pour une entreprise plus éloignée), en cas de difficulté financière imprévisible …

2 - L’avantage de la bourse sur l’investissement immobilier.

Comparons maintenant les caractéristiques du placement en bourse avec celles de l’immobilier.

D’abord, on peut commencer à placer en bourse à partir de 500€ (voir moins, mais ça commence à devenir ridicule… sauf si le but est juste de « prendre date » afin de bénéficier de la fiscalité attractive du PEA après 5 ans de détention) en optant pour un courtier en ligne (BoursoBank, Fortuneo, Saxo Bank…). Ensuite, il n’est pas nécessaire de se placer en situation d’insécurité financière avec un emprunt censé être remboursé par un locataire qui peut parfaitement faire défaut, même si une coûteuse assurance contre les impayés (2% a 5% du montant du loyer) viendra traiter le problème. Avec la bourse, le risque reste limité au capital investi, la gestion du patrimoine reste légère puisqu’il n’y a pas vraiment de démarche régulière à effectuer (déclaration, travaux de mise aux normes, taxe foncière annuelle dont le montant peut évoluer très fortement, lourds travaux de réfection décidés par la copropriété). Il est possible de diversifier ses risques en investissant sur des secteurs variés (banque, finance diversifiée, assurances, pétrole et gaz, construction électrique, bâtiment, luxe, aéronautique, automobile, distribution, agroalimentaire, semi-conducteurs, informatique, ingénierie etc) ou des secteurs géographiques élargis puisque le chiffre d’affaires des sociétés du CAC40 est très majoritairement réalisé à l’étranger. On pourra également bénéficier de la fiscalité attractive du PEA en investissant sur des sociétés européennes (Allemagne, Pays-Bas, Belgique, Italie, Espagne, pays scandinaves etc) en direct avec des titres de sociétés cotées ou au travers de fonds ETF. Avec l’immobilier, le risque reste étroitement lié à la bonne santé économique du secteur géographique immédiat. Ce dernier point est absolument crucial : il est moins sensible lorsque l’investissement immobilier est réalisé dans une grande ville, mais le prix sera plus élevé et la rentabilité plus faible. Le risque associé aux potentielles difficultés économiques du secteur géographique impactera autant la valeur du bien à la revente que la sécurité et la pérennité de paiement du loyer, puisque le locataire peut avoir envie de quitter une zone sinistrée, parce qu’il travaille pour le principal employeur de la ville, parce que son emploi dépend indirectement de cet employeur (par exemple s'il travaille dans une entreprise de restauration près de la principale usine de la ville), parce que la vie quotidienne devient difficile (après la fermeture des commerces et services de la zone).

Lorsque l’on place son épargne sur des actifs boursiers, le délai de vente est presque inexistant puisqu’il est possible de vendre et d’acheter directement depuis son mobile ou son ordinateur, à un prix que l’on pourra fixer très précisément grâce aux « ordres à cours limité », la vente se réalisant le jour même. Avec l’immobilier, le prix de vente sera soumis aux conditions de la négociation, à l’urgence de la vente (surtout s’il y a des frais à régler auprès de l´Etat ou du notaire pour honorer une succession par exemple). Si le vendeur s’accroche à un prix de vente non négociable, le délai de vente pourra dépasser plusieurs mois. Les actifs boursiers sont liquides (de grandes quantités de titres sont négociées chaque jour sur Euronext, l'opérateur réalisant la négociation des titres financiers a la bourse de Paris), chaque titre représentant la même fraction de l’entreprise : on peut en acheter ou en vendre un montant précis, s’approchant au plus près de la somme choisie, grâce aux ordres à cours déterminés (exécutés une fois que le cours est atteint), alors que l’achat immobilier nécessitera d’immobiliser une somme importante pour une longue période, qui ne pourra pas être disponible immédiatement pour profiter d’une opportunité. Reportez-vous à l’article nº4 pour obtenir le détail des avantages fiscaux rattachés au Plan d’Epargne en Action.

Autre point important : une action de société cotée acquise sur Euronext est un titre de propriété, exactement comme l’appartement que l’on achète via le notaire. Ce titre de propriété donne le droit de participer aux assemblées générales de l’entreprise. C’est donc une alternative à l’impossibilité d’acheter son logement. Un portefeuille de titres financiers « vifs » est un authentique patrimoine, plus facile à convertir en monnaie sonnante et trébuchante qu’un appartement mise en vente ! L’article 6 sur ce blog explique dans quelle mesure une épargne financière peut servir pour sécuriser sa capacité à se loger (caution bancaire, garant privé…).

Par ailleurs, il est important de comprendre dans quel mesure le monde de l´investissement immobilier est truffé de mauvaises recommandations, avec des individus profitant de la crédulité des particuliers. Il existe une chaîne YouTube absolument remarquable : celle de Martin Salva (Vendeurs de Vérités). L’auteur de la chaîne a publié un livre (marchand de biens) et des vidéos de formation totalement gratuites, disponibles sur sa chaîne. Il s’est d’ailleurs fait attaquer (et même plagié) par d’autres Youtubeurs vendeurs de formation (à 1997€ …). Il a dû remettre à sa place Sebastien More et s’est fait plagié par Timothée Moiroux et Yomi Denzel, reprenant son livre « Marchand de Biens ». Salva dénonce les théories sur l’investissement immobilier développée dans un livre, central pour les vendeurs de formation : « Père riche, père pauvre » de Robert Kiyosaki, qui énumère un certain nombre de recommandations reprises par la plupart des formations déployant un maximum de publicité sur internet et promettant la « liberté financière ». Si Martin Salva développe un maximum d’humour pour dénoncer la rhétorique des vendeurs de ces formations (voir sa vidéo la mythode vdv ! Milliardaire immobilier en partant de zéro), il a surtout publié un ensemble de vidéos intitulé « fausses croyances », chacune d’elle analysant la crédibilité de chaque recommandation émise par Kiyosaki (durée d’emprunt la plus longue possible, la résidence principale qui ne doit pas être achetée, sur le cash flow et les rentiers immobiliers, l’apports pour les crédits immobiliers, l’école rend-t-elle pauvre, le cash-flow est une illusion, éviter l’impôt en location meublée est une illusion, l’arnaque des déficits fonciers et déficits immobiliers, la « face cachée » de l’acte en mains…). Vous trouverez chacune de ces vidéos sur YouTube en cherchant vendeur de vérité fausse croyance + thème. Les démonstrations réalisées par Salva sont mathématiques, basées sur des exemples détaillés montrant que la recommandation extraite du livre de Kiyosaki est erronée. Salva prouve donc la volonté de tromper de ces formateurs, qui pullulent sur internet avec des formations extrêmement coûteuses. La tromperie autour du coaching immobilier promettant la liberté financière est un élément à charge contre la liberté financière promise par l’investissement immobilier.

J’espère avoir pu apporter assez d’éléments de réflexion pour inciter le lecteur à se méfier de l’investissement immobilier et à réfléchir sur l’opportunité de se bâtir un patrimoine (dont on est réellement propriétaire !) sans emprunter, grâce à un investissement sur des actifs boursiers réels (en titres de sociétés cotées).

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